Nous publions au fur et à mesure les interventions de nos trois invitées lors de notre événement du 10 octobre 2015 à l'Espace des Diversités et de la laïcité à Toulouse.
Intervention de Duha
Al-Ashour
L'exil
Première
année : fuite, dépaysement et incertitude
En
Syrie, il était courant d'utiliser le terme « toit de la
patrie » après le début de la révolution en 2011, généré
et répandu par les médias du pouvoir, ses hommes politiques ainsi
que ses théoriciens. Depuis, les Syriens ont été classés en
fonction de leurs réclamations : ceux qui demandaient des
réformes superficielles étaient
acceptés sous le « toit de la patrie », tandis que ceux
qui réclamaient des réformes radicales et participaient à la
révolution, étaient considérés en dehors du toit de la patrie.
Autrement dit des collaborateurs avec l'ennemi méchant et donc des
traîtres et méritent le traitement des traîtres.
Début
août dernier, une jeune syrienne : Lana Mouradni a été
arrêtée par le régime syrien. C'est la fille d'amis qui sont eux
aussi d'anciens prisonniers politiques. Sa mère a écrit qu'elle
était contente car elle pouvait informer les gens que sa fille avait
été arrêtée et que ses amis n'allaient pas nier leur relation
avec elle à cause de cette information.
Cette
jeune femme, Lana, est ingénieur informatique ; elle
travaillait avec l'UNICEF dans un programme éducatif adressé aux
enfants de la région d'Al-Ghouta assiégée à côté de Damas.
Pourriez-vous
imaginer cette espèce de bonheur ? Le bonheur que vous
ressentez lorsque vos proches et les gens qui vous aiment peuvent
déclarer leur solidarité avec vous ?
Cette
sorte de bonheur ou de grâce, une génération entière de
prisonniers politiques à l'époque du père Assad en étaient
privés. C'était également le lot de ma famille. Le plus dur était
pour ma fille, Diana, qui est née en prison. Elle a beaucoup
souffert de se sentir exclue par ses amis qui s'éloignaient d'elle
car ses parents avaient peur et craignaient que l'accusation touche
leurs propres enfants. Pendant longtemps, Diana craignait que les
gens apprennent où elle est née, car c'est lié à la prison.
Dans
les années 80 et 90, ma famille a payé environ 40 années de prison
entre mes frères, mes soeurs et moi-même. Mon frère est retourné
en prison à l'époque du fils Assad. Nous étions régulièrement
convoqués pour des enquêtes, interdits de quitter le pays,
interdits de travailler également. Le toit de la patrie était bas
et humiliant. Ce toit qui avait décidé de transformer la Syrie en
un grand cimetière et en une prison encore plus grande. C'est ce
toit qui a poussé les Syriens à se révolter en mars 2011. C'est le
même qui les pousse aujourd'hui à risquer leurs vies et leurs
économies, en mer et dans les forêts, pour fuir ce toit terrible.
Ça
se passe sous le toit de la patrie
Darayia,
petite ville agricole et artisane
qui jouxte la commune où j'habitais, dans la banlieue de
Damas (Sahnayia) ; c'est elle (Darayia) qui nourrit les petites
communes à côté, et est la ville de Ghayath Matar, le jeune homme
qui a offert des roses aux soldats du régime mais ils l'ont tué
froidement devant tous les autres manifestants pacifistes. Darayia a
été assiégée. Nous étions donc privés de pain, de lait, de
yaghourt et des légumes. L'une des femmes déplacées nous parlait
amèrement de ses vaches tuées par les balles d'un sniper, de ses
poules qui sont mortes à cause du froid et du manque de nourriture.
Par
les ruses et les stratagèmes nous proposions à ses petits enfants,
qui pleuraient jour et nuit réclamant le lait, de boire l'eau du riz
ou de la fécule bouillie avec du sucre. Ils acquiesçaient avec
peine.
A
l'autre bout de la Ghouta – Banlieue de Damas, les gens jetaient le
lait sur les routes refusant qu'il arrive à la capitale ;
c'était leur réponse au régime qui les privaient de pain, de
farine et de chlore pour désinfecter l'eau !
Ce
sont les horreurs de la guerre et sa folie ! Les
gens, en temps de guerre, peuvent faire des choses irrationnelles, et
c'est compréhensible.
Maadamié
al Sham, petite commune dans la banlieue de Damas, a connu beaucoup
de massacres et vit actuellement une trêve très dure. Un jeune de
cette commune témoigne : il raconte comment ils perdent un
temps fou devant les check-point à l'aller et au retour, car les
agents les fouillent par crainte qu'ils ne fassent rentrer de la
nourriture dans la ville. L'étudiant a le droit d'emporter avec lui
un seul paquet de biscuits supposé satisfaire ses besoins jusqu'au
lendemain ! Et ce selon un plan de guerre utilisé dans toutes
les
régions où des affronts ont lieu, basé sur le principe :
affamer les gens pour les faire obéir. Dans cette guerre on se sert
de la levure de
pain par exemple, comme outil pour tuer les gens à petit feu en les
privant de leur principale source alimentaire.
Ma
fille et nombreux de ses camardes se sont trouvés obligés plusieurs
fois à
ne pas se présenter aux examens universitaires à cause des routes
coupées. Longtemps aussi,
ils étaient contraints de
s'y rendre à pied.
Malgré cela, ils avaient plus de chance que leurs camardes qui se
faisaient tuer par des tirs sur la faculté d'architecture de Damas.
Pour
la deuxième fois, des médecins de la commune de Douma dans la
banlieue de Damas appelaient au secours afin d'arrêter les combats,
et établir une trêve entre les combattants pour permettre d'évacuer
les blessés et enterrer les victimes décédées. Les images qui
nous parviennent de là-bas montrent des médecins qui opèrent avec
des outils rudimentaires, sans anesthésie ni désinfection, se
servant de leur téléphone portable comme seul éclairage !
Dans
les zones de conflit, les gens vivent leurs mythes quotidiens ainsi
que leurs miracles pour survivre. Ils travaillent et apprennent dans
des conditions insoutenables. Pour la 5ème année consécutive, les
communes de la Ghouta travaillent à assurer la nourriture, les
légumes et l'eau. Ces communes sont tout de même dans de meilleures
conditions que les communes avoisinantes qui ont été détruites,
brûlées et dont les habitants avaient été tués par l'arme
chimique, les barils et différents projectiles. Sans parler des
arrestations, des enlèvements et des blessés. Les gens disent :
« J'espère qu'il reviendra même mort, qu'on aura juste au
moins son corps ! » Ce sont les ultimes souhaits de ces
gens épuisés dans l'attente d'une solution, une trêve ou une
transaction d'échange. Ils ont été obligés à se déplacer, à
demander l'asile (en Syrie, il y a actuellement plus de 8 millions de
déplacés au sein même du pays, et plus de 4 millions de réfugiés
dans les camps des pays voisins et ailleurs dans le monde alors que
le pays comptait 22 millions de Syriens avant la guerre !).
Pour
la 5ème année, il y a dans mon pays une guerre qui ne s'est jamais
arrêtée. La mort abondante est devenue une banalité dans les
infos. Cette mort a laissé la place à ses extraordinaires
variations, qui font la Une des journaux dans le monde : la mort
par noyade, asphyxié dans un camion, brûle, ou étouffé dans les
camps… Et ce sans parler de Daesh – l’État islamique et ses
exactions « hollywoodiennes » contre des civils sans
défense.
L'exil
C'était
la première fois que je quittais « le toit de la patrie »,
car j'étais interdite de voyage. Dès les premiers instants, j'étais
envahie par des sentiments contradictoires : le sentiment d'être
sauvée de la poignée de la tyrannie sous toutes ses formes, le
plaisir de découvrir l'horizon sans limites, le tout mêlé à
l'appréhension d'être dévoilée, découverte, à nue : seule avec
une mémoire ensanglantée face à un monde étrange qui m'indique
qu'il faudrait que je remette en question toutes mes connaissances,
et me redéfinir : qui suis-je ? Et qu'est-ce que je veux ?
J'ai
passé la première année de mon exil dans un centre pour réfugiés
dans la banlieue parisienne. Les gens des quatre coins de la planète où
il y a des guerres, de la misère et de la pauvreté, viennent en
France pour tenter leur chance d'une vie meilleure. Des Français
nous demandent régulièrement : pourquoi avez-vous choisi la
France comme pays d'asile ? La plupart des réfugiés répondent
par cette phrase qui, à leurs yeux, est censée satisfaire les
autorités : la France est le pays de la liberté, de l'égalité
et de la justice.
En
réalité, nous sommes les victimes d'une longue tyrannie. La guerre
froide et chaude ! Et nous avons peur !
Il
m'est très douloureux de constater que les Syriens sont les
réfugiés qui ont le plus peur, habités également par la douleur
et les regrets. Ils ont peur d'exprimer leurs avis concernant la
nourriture, la lourdeur des démarches administratives, et la
complexité de la langue française.
Tout
simplement, nous, nous n'avons pas choisi la France. Nous avons
simplement fui la guerre. Or, celui qui fuit n'a pas de choix.
J'aurais pu être une de ces personnes qui sont mortes noyées en
mer. Car si l'ambassade de France avait refusé ma demande d'asile,
je n'aurais pas eu d'autre choix !
Le
déchirement entre là-bas et ici
Être
chassé et contraint à s'éloigner de son pays, contrant à
quémander l'exil comme seule voie pour exister, cette expérience de
s'arracher à un lieu et se jeter dans l'inconnu même s'il semble
être très confortable est une expérience semée de dangers et de
sentiment de culpabilité : nous nous sentons coupables d'avoir
abandonné nos amis dans l'épreuve. Nous traînons également des
sentiments d'échec et de déception. En tant qu'être humain
simplement, je me suis épuisée et je ne supporte plus. J'ai perdu
un rêve et la possibilité du changement ; il se peut aussi que
j'aie perdu la possibilité de m'exprimer et à avoir de la
légitimité. َEst-ce
que j'ai encore le droit le parler du droit des gens à la vie et à
la liberté alors que j'ai fui et je n'en ai pas payé le prix ?
Ma
mémoire me fait souffrir. Mais sans mémoire qui suis-je, vers quoi
je vais et dans quel but?
L'exil
c'est vivre tous les jours ce déchirement. C'est ne pas savoir si
l'on est content de soi, de nos choix, ou en colère ! L'exil a
toujours été et est encore, l'une des punitions que la tyrannie
inflige aux individus qui osent lui faire face et résister. Elle les
condamne à être presque atomisé entre là-bas et ici ; à
exercer sur eux une pression énorme entre la tendance normale chez
les êtres de s'installer et d'avoir droit à une vie stable et
tranquille, et l'état d'une dignité qui saigne, car ne pouvant pas
supporter l'humiliation, elle se nourrit pour survire, de l'espoir du
retour et de retrouver ainsi ce qu'elle avait perdu, et en premier
l'entité de l'être, sa place afin de pouvoir construire une
situation dans la société.
Perdre
son pays n'est pas une expérience liée à un lieu particulier.
D'ailleurs j'ai peut-être la chance d'avoir trouvé un autre lieu en
France. Ce n'est pas non plus la chance d'une vie meilleure que celle
que j'avais en Syrie. La perte du pays est la mère des pertes :
d'un seul pas, nous nous trouvons suspendus au-dessus d'un gouffre :
la perte de la certitude, non seulement de ce en quoi l'on croyait,
mais de ce qui était ancré en nous d'une manière concrète et
palpable : nous avions un pays, une maison, des proches, un
quartier, etc. Que je sois syrienne est une chose des plus évidentes
de mon existence. Mais aujourd'hui, j'ai besoin d'explication, de
justifications et de justificatifs , surtout que la guerre a emporté
avec elle toute preuve. Désormais, je ne reconnais plus aucune
maison, aucune rue. Plus rien ne m'est familier. Les maisons de mes
parents et de mes proches à Alep ont été détruites, les souks
saccagés et dépouillés. Les arbres que j'aimais tant sont morts.
Les amis et les gens que j'aime se sont tous dispersés partout entre
prison, exil et perte. Ma propre famille s'est trouvée éclatée
dans plusieurs endroits. J'en suis même à craindre la perte de la
langue qui me permet de communiquer avec mes petits neveux dispersés
entre l'Allemagne et la Turquie. Je communique encore avec eux grâce
aux photos et aux dessins. Un jour je ne pourrai plus leur écrire en
langue arabe, cette langue que j'aime, car ils ne l'ont pas connue !
En
exil, tu dois choisir, toi qui es en pleine hésitation ! Le
pays qui t'accueille attend de toi que tu t'intègres et que tu
deviennes un citoyen comme les autres. Or, lorsque tu prends ce
chemin d'intégration tu as l'impression de « trahir »,
ta famille et ton pays. Egalement, ce chemin est épineux ; tu
ne peux y avancer vite à partir du moment où tu rythmes ta vie en
fonction : des pertes des gens de ton pays, leurs blessures, les
heures de pénurie d'électricité, le fait que tu remets sans cesse
et sans fin le coup de fil que tu devais passer à ta maman le temps
de trouver de quoi lui raconter que vous allez vous voir tout en
sachant que cela n'est pas possible, et enfin le fait que la
communauté syrienne est perdue autant dans ses buts que dans ce
qu'elle veut, les Syriens comme toi sont fatigués, épuisés par les
déchirements, les différends et les amertumes…
Tu
dois donc trier tes priorités tout seul : est-ce que je dois
apprendre d'abord la nouvelle langue ou bien oublier ce qui s'est
passé et ce qui se passe ? Où est-ce que je vais habiter ?
C'est quoi le moins cher à long terme : un mobilier d'occasion
ou un mobilier tout neuf ? Et ce long terme va durer combien de
temps ? Est-ce que je ne vais plus retourner en Syrie ?
Penser
que nous pourrons retourner en Syrie est primordial. Car cela permet
d'apaiser l'inquiétude quand à la vie, ses épreuves et ses
difficultés, car lorsqu'on revient au pays, on retourne à nos
maisons, à notre amoureux, à notre mère et à la patrie, nous
revenons à la vie en quelques sorte après la mort ! C'est
ainsi que le HCR (l'Agence des Nations Unies pour les réfugiés)
nous garantit le droit de revenir chez nous après la guerre..
Les
Palestiniens se sont posés la question depuis plus de 60 ans :
l'exil est-il un passage ou un lieu où on s'installe ? La
plupart des expériences prouvent que souvent très peu d'individus
forcés à l'exil reviennent au pays d'origine. Cela nous oblige à
essayer de trouver d'autres choix : que pourrait-on faire pour
notre pays d'origine à partir de notre exil ? Qu'attendent les
Français de nous qui vivons grâce aux aides de l’État ?
Est-ce qu'un individu doit se contenter d'un seul pays ? Et
c'est quoi un pays ou une patrie ? Est-ce le lieu et les
relations qui, pour être construites, nécessitent la capacité de
la personne à donner et à interagir ? Ou bien le lieu et les
relations dont a besoin l'individu comme un soutien face à sa
solitude, sa faiblesse et ses besoins ?
La
patrie est-ce une fatalité ou un choix ? Est-elle le toit de la
dictature ou l'espace de la citoyenneté ?
Jusqu'à
présent, je n'ai parlé que des difficultés de l'exil, la dureté
des épreuves face auxquelles il nous met et qui sont sans doute très
nombreuses vis-à-vis de gens qui ont fui une guerre féroce pour
survivre. Mais les exils ont d'autres côtés, d'autant plus qu'il se
trouve que ces exils sont des pays dont la culture est bien ancrée
dans l'histoire, et des systèmes démocratiques basés sur des
institutions, sur la loi et des sociétés civiles qui nous donnent
des occasions pour apprendre par notre
propre expérience, sur le terrain. Elles permettent aussi une
vision plus globale et plus claire de nos problèmes, maintenant que
nous sommes loin de la guerre et de la pression quotidienne qui ne
constituent pas un environnement propice à l'émergence de nouvelles
idées et de solutions.
Des
sourires coûteux
La
première chose qui a attiré mon attention lorsque je suis arrivée
à Paris ce sont les sourires des Français, leurs gestes et leurs
réactions calmes généralement. Le hasard avait fait que j'ai
travaillé dans la rédaction d'une rubrique qui s'appelle « les
journaux d'autrefois » dans un journal syrien en ligne, ce qui
m'a permis de découvrir une revue en papier très ancienne qui
portait le nom : « Chroniques de la deuxième guerre
mondiale ». Hormis ce que j'y ai lu comme détails sur les
batailles et les plans militaires, le nombre des blessés et l'état
des soldats, etc., j'y ai surtout lu le quotidien des gens : ce
dont ils étaient privés, le manque d'habits et de nourriture, leur
douleur de se séparer de leurs proches, leurs villes détruites.
Certaines photos parlaient des maladies, des handicaps, des besoins ;
j'y ai vu la peur, la tristesse et le choc… Enfin, de tout ce que
les guerres et les catastrophes sont capables de générer. C'était
une découverte pour moi que de constater que les Français se sont
remis de leurs profondes blessures ! Et je me suis mise à
écrire à mes amis en Syrie avec un grand espoir : les Français
sourient car ils sont rassurés du fait que la guerre, les maladies,
la faim, la tyrannie, le racisme, sont derrière eux maintenant,
enterrés là-bas dans les livres d'histoire ; ils en avaient
payé le prix cher et ils ont décidé de ne plus avoir recours
aux guerres pour régler les contradictions. Nous aussi nous aurons
notre sourire dont nous payons les frais aujourd'hui.
Sauf
que les gouvernements des pays puissants font parvenir des messages
totalement différents à nos peuples maltraités, lorsqu'ils ferment
les yeux sur ce que les dictatures font, sur ce que les systèmes
mafieux et leur commerce d'êtres humains, lorsqu'ils hésitent à
combattre les systèmes tyranniques, lorsqu'ils facilitent le
commerce d'armes, que certains laissent passer les djihadistes dans
nos pays (le nombre d'étrangers parmi ces derniers dépassent 80,000
combattants ) et lorsqu'ils dépensent énormément d'argent et de
temps afin d'essayer d'intégrer les gens dans leurs sociétés alors
que certains ne peuvent ou ne veulent pas s'intégrer.
Stopper
la guerre en Syrie et éradiquer la tyrannie, coûteraient beaucoup
moins cher que le coût d'en supporter les conséquences sur tous les
plans. La France est aujourd'hui mon pays pour lequel je ne souhaite
(et à aucun autre) souffrir des répercussions de l'injustice, de la
pauvreté et des horizons fermés. Je souhaite que le sourire des
Français se répande et arrive à mon pays et non le contraire, que
je crains tout de même tellement tout est inextricable dans ce
monde.
A
mon pays la paix et la liberté.
Et à
vous le « salam » !
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Traduit de l'arabe par Rawa Pichetto